La répression policière s’abat sur la marche de l’opposition à Kinshasa

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Samedi 20 mai, des centaines de militants d’opposition ont tenté de manifester pacifiquement dans la capitale congolaise pour dénoncer la situation socio-économique du pays et la gestion du pouvoir par le président Félix Tshisekedi. Mais ils ont été violemment dispersés par la police qui leur reprochait de n’avoir pas respecté l’itinéraire établi par les autorités.

Une marche autorisée mais entravée

La marche avait été autorisée par le gouverneur de la ville de Kinshasa, Gentiny Ngobila, à condition que les manifestants empruntent un itinéraire précis qui devait les conduire du rond-point Victoire au boulevard Lumumba. Mais les organisateurs de la marche, quatre opposants candidats déclarés à la présidentielle de décembre, à savoir Moïse Katumbi, Martin Fayulu, Delly Sesanga et Matata Ponyo, ont décidé de se rassembler dans la commune de Ngaba, dans le sud-est de la ville, sur l’avenue Kianza, une artère stratégique qui relie le centre-ville au quartier populaire de Lemba.

Dès 8h du matin, une grosse centaine de manifestants se tenaient sur cette avenue, brandissant des drapeaux, des pancartes et des effigies des leaders de l’opposition. Ils scandaient des slogans hostiles au chef de l’Etat, l’accusant d’avoir trahi le peuple et d’avoir plongé le pays dans la misère. “Tshisekedi dégage, ton mandat est fini, la vie est devenue intenable”, criaient-ils.

Une répression brutale

Vers 10h, les quatre opposants sont arrivés sur les lieux, vêtus de blanc, symbole de la paix. Ils ont été aussitôt encerclés par des dizaines de policiers anti-émeute qui leur ont interdit de lancer la marche. S’en sont suivies de longues discussions, puis une salve de tirs de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants.

Certains ont barricadé la route à l’aide d’étalages de commerce de fortune quand d’autres lançaient des projectiles contre la police. La police a riposté en lançant des gaz lacrymogènes et en procédant aux interpellations musclées d’au moins une dizaine de personnes. Des témoins ont rapporté avoir vu des policiers battre des manifestants à coups de matraque et de crosse.

Jusqu’à 12h, les quatre opposants étaient coincés dans leurs voitures encerclées par les forces de l’ordre. Peu après, la police a quitté en catastrophe le point chaud de la manifestation escortant les opposants à bord de leurs jeeps. C’était sous de nombreux jets de pierre et de gaz lacrymogène.

Une condamnation unanime

Les opposants ont dénoncé une répression injustifiée et disproportionnée qui témoigne selon eux du caractère dictatorial du régime en place. “C’est déplorable pour un ancien opposant”, a commenté Moïse Katumbi. “On n’avait jamais vu ça sous l’ancien régime de Joseph Kabila”, a affirmé Matata Ponyo. “C’est une violation flagrante des droits humains et des libertés fondamentales”, a renchéri Delly Sesanga.

La marche a également été condamnée par la société civile et les organisations des droits humains qui ont déploré les actes de violence commis tant sur les civils que sur les policiers. Elles ont appelé à une enquête indépendante pour identifier et sanctionner les responsables.

Le gouvernement, quant à lui, a déploré les actes de violence mais a rejeté la responsabilité sur les organisateurs qui n’auraient pas respecté l’itinéraire convenu avec les autorités. Le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a affirmé que “la violence n’a pas sa place en démocratie” et que “le gouvernement condamne toute forme de violence observée tant sur les civils que sur les policiers”. Il a également appelé à la responsabilité des uns et des autres.

La marche de l’opposition intervient dans un contexte politique tendu en RDC où le président Tshisekedi fait face à une contestation croissante sur sa légitimité et sa capacité à résoudre les problèmes du pays. Les opposants lui reprochent notamment d’avoir rompu son alliance avec son prédécesseur Joseph Kabila pour s’allier avec l’ancien président Jean-Pierre Bemba et le prix Nobel de la paix Denis Mukwege. Ils l’accusent également d’avoir dissous le Parlement et d’avoir nommé un nouveau gouvernement sans consultation préalable.

Les opposants ont annoncé qu’ils allaient poursuivre leur mobilisation jusqu’à ce que le président Tshisekedi quitte le pouvoir ou organise des élections anticipées.

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